Edito 2015 de la directrice artistique : LE POINT ZERO

D’actualité ces derniers jours, nous pouvons dire que le point zéro est au commencement de tout, ou à la fin d’un processus qui ne nous a conduit à rien. Il est toujours proche de la crise, et la crise, on l’a toujours dit, n’est pas une tragédie, c’est une opportunité. C’est se retrouver à un carrefour et pouvoir choisir une nouvelle route, une route différente de celle qui nous a menés dans une impasse. L’énergie du point zéro ce n’est pas le néant, c’est l’énergie du vide. Si l’intelligence nous guide, l’intelligence des émotions, de la survie, le vide peut devenir un espace pour la nouveauté. Pour nous et pour les autres. C’est le point zéro, quand on est arrivé au pied du mur, à l’immobilité, à l’hégémonie d’une violence brutale, à l’absence de communication, là où il ne reste plus qu’un choix de vie : avancer. Voilà où vivent et évoluent les héros des films de notre sélection 2015 :

 

Conducta,, film cubain où une institutrice proche de la retraite défend son jeune élève promis à la maison de correction par un système caduc. Mateo, film colombien : Un jeune délinquant doit infiltrer une troupe de théâtre, et le groupe lui offre une alternative à la violence. Un thème qui se retrouve, traité sur le ton de la comédie, dans l’univers carcéral avec Ley de fuga, film vénézuélien. La visita, film chilien : après une longue absence une jeune transsexuelle revient chez elle – pour la première fois en tant qu’« elle » – ­pour l’enterrement de son père et vit des retrouvailles difficiles avec sa mère. Retratos de una búsqueda, documentaire mexicain : La douleur de la perte des enfants dans la violence de la « narcoguerre » est si grande que trois mères, puis d’autres, commencent une mobilisation organisée qui réussit à sensibiliser le Mexique actuel, pays des étudiants disparus à Ayotzinapa. Dans Güeros, film mexicain lui aussi, une longue grève à l’Université Autonome de la capitale fige la vie des étudiants jusqu’à ce que Sombra et son colocataire reçoivent la visite de son jeune frère et se lancent à la recherche d’Epimenio Cruz, le musicien qui a fait pleurer Bob Dylan, et qui les amènera à se chercher eux-même. Mr. Kaplan, la comédie uruguayenne : un vieux juif de 76 ans réalise, de même que son partenaire ex policier qui lui servira de chauffeur, qu’il n’a plus rien à perdre. Il va se lancer dans l’aventure qui doit donner un sens à sa vie : arrêter un supposé ancien nazi. Enfin Historias de cronopios y de famas, film d’animation argentin qui s’inspire du monde de Cortázar où, si nous devions le définir, la rigidité est le point zéro des famas et celui des cronopios est l’ouverture et la liberté.

Empreintes de Liberté, le thème du focus des 17es Rencontres réunit des documentaires sur le cinéaste chilien Patricio Guzmán, sur la lutte des femmes travaillant dans les mines en Bolivie, sur l’utopie d’une frontière invisible, sur une cooperative textile en Argentine. Et un film chilien, Las cosas como son, qui désigne la peur comme la plus grande usurpatrice de toutes nos libertés.

La peur, Jorge el Tigre Cedrón n’y a pas cédé. Cedrón, le passionné, figure clef du cinéma politique argentin. Nous lui dédions un hommage avec la projection de ses œuvres restaurées.

Nous aurons aussi une leçon de cinéma donnée par Sabrina Farjí, la réalisatrice de Eva y Lola. Le public de Marseille et des nombreux étudiants et élèves venus aux Rencontres connaissent bien ce film.

N’oublions pas le chapitre Cinéma et littérature dédié à García Marquez avec le film Del amor y otros demonios…Ni les courts métrages touchants, drôles, surprenants.

 

Ne manquez rien ! Profitez de tout ! Bonnes dix-septièmes Rencontres.

 

Claudia Baricco